Travaux en cours #2

À gauche : Lors d’une manifestation, en tout début de mandat, pour protester contre la politique du nouveau président Emmanuel Macron. Toulouse, France – 2017.

À droite : Affiches électorales de Marine Le Pen dans l’entre-deux-tours présidentiel. Sa campagne était beaucoup axée sur le « pouvoir d’achat ». Brive la Gaillarde, France – 2022.

Et voilà ! Le Covid s’est introduit dans nos boîtes crâniennes. Par chance, le virus nous a touchés avec un petit décalage, ce qui fait que l’on a pu s’occuper l’un de l’autre. Il faut dire que c’est quand même bien désagréable, surtout quand tu crains que cela débouche vers une otite carabinée. Et puis la productivité dans le travail en prend un sérieux coup.

Ces derniers jours, nous nous sommes rendus à une fête familiale et puis nous avons circulé durant la période d’entre-deux-tours de l’élection présidentielle pour poursuivre notre série en cours sur l’extrême-droite en France commencée il y a dix ans. À cet effet, un samedi, nous avons photographié Place du Vigan à Albi la centaine de personnes qui s’étaient donné rdv pour « Lutter contre le racisme et organiser la solidarité ». Nous sommes aussi allés deux fois à Toulouse pour documenter une manifestation « ni Macron ni Lepen » de plus de 100 personnes ainsi qu’un « grand rassemblement » au Bikini organisée par Carole Delga (Présidente de la Région Occitanie), qui a débuté par la prise de parole vidéo d’Edgar Morin. Cette soirée réunissant 1 400 personnes pour « faire barrage » au Rassemblement National avait lieu 20 ans jour pour jour après la qualification au second tour de Jean-Marie Le Pen face à Jacques Chirac.

Enfin, nous sommes allés dans le Carmausin et dans le Graulhetois où les scores lepénistes étaient élevés. Pour l’anecdote, à la cité minière de Saint Benoît de Carmaux, nous avons un peu été les protagonistes d’une scène digne d’un polar poisseux. Sous une pluie fine, alors que je photographiais une affiche électorale de Marine Le Pen (sur laquelle quelqu’un avait collé à la place de son visage un portrait en noir et blanc de Jean Jaurès), je vois arriver en trombe deux retraités (vêtus de sortes de treillis si j’ai bien vu) dans un 4×4 vieillot, avec tout le matériel de collage à l’arrière :

– Vous faites quoi ?
– Ben, comme vous voyez, je suis en train de photographier l’affiche électorale. Pourquoi ?
– Y a une folle, elle passe son temps à nous les arracher !
– Ah, moi c’est à cause du portrait de Jaurès que je me suis arrêté.
Blanc et fin de la conversation.

Cinq minutes après les avoir laissés, nous sommes repassés au même endroit ; les deux papis du RN n’étaient plus là et une nouvelle Le Pen avait été collée sur la précédente pour cacher le portrait de l’illustre socialiste. Sûrement qu’ils étaient partis dare-dare changer les portraits qui avaient étés « Jaurèsisés », comme celui près de l’école que nous venions juste de prendre en photo.
Le lendemain des résultats de l’élection présidentielle, nous avons lu dans la presse que pour la première fois Carmaux, fief historique de la gauche, a voté majoritairement à l’extrême-droite. Pour info, dans le Tarn, Emmanuel Macron est arrivé en tête mais de peu (avec 53 % contre 47% pour Le Pen) et dans le Tarn-et-Garonne (notre ancien département dans lequel nous avons vécu une douzaine d’années), c’est Marine Le Pen qui est arrivée première (avec 52% contre 48% pour Macron).

En ce qui concerne la première image du diptyque, elle est issue d’un travail dont on ne se souvenait absolument plus et que nous sommes en train de rendre visible. C’est en parcourant, en début de mois, plusieurs disques durs pour essayer de libérer de la place que nous sommes tombés sur des images scannées en très basse définition stockées dans des disques différents. Après les avoir réunies dans un même dossier, nous nous sommes vite aperçus que cela constituait un corpus d’images homogène et que, si on lui donnait un titre tel que : « La Lutte sociale dans la rue sous Macron av. G.-J. (avant les Gilets Jaunes) », le sujet fonctionnait. Il assurerait un prolongement en bien plus détaillé du travail que l’on avait mené « sous » Hollande lors de la Loi travail dite aussi Loi El Khomri (voir le sujet « On ne capitolera pas »).

On s’est dit que si l’on ne s’en occupait pas maintenant, il était fort probable que l’on n’y revienne jamais (tellement on a de retard avec les photos du tour de France). Du coup, nous avons ressorti notre bon vieux Nikon (réparé de multiples fois par l’Ami Sergio) et nous avons scanné puis nettoyé les poussières des 293 images finalement sélectionnées.
Il semble à Toto que le brouillard créé par le Covid correspond plutôt bien à l’état d’esprit qu’il avait au moment des prises de vue. C’était une période pénible faisant suite à l’histoire de Sivens qui avait pas mal déprimé son monde. Et puis son tour de France à vélo était suspendu à cause de problèmes de santé physique des plus tenaces. À cette époque, il se demandait très souvent s’il n’allait pas abandonner la photographie. Alors pas étonnant que l’on ait complètement oublié ces images.

Actuellement, il est en train de créer des diptyques comme nous avons l’habitude d’en proposer, mais à un rythme moins soutenu. Normalement, il peut en monter une cinquantaine par journée de travail et là, il en a à peine fait quarante depuis quatre jours. Gageons que la qualité sera, elle, au rendez-vous !

On ne sait pas si vous avez vu, mais Jim a installé une nouvelle version du logiciel qui permet de visualiser les photos et les légendes du site. À ce sujet, il a écrit un très bon post que l’on vous conseille de lire (voir post précédent). Merci encore à lui, et pour le logiciel qui améliore la navigation sur le site et pour le post !
Sa lecture nous a fait penser au regretté philosophe Bernard Stiegler et à tout son travail sur l’économie de la contribution. Toto avait assisté à une de ses brillantes conférences (en 2005 s’il se souvient bien) lors de sa seule visite au célèbre festival des Rencontres de la Photographie d’Arles. Depuis un moment, nous cherchions une occasion de lui rendre hommage dans notre modeste blog : l’ami Jim avec qui nous parlions souvent de Mr Stiegler nous la donne. Beaucoup de très bonnes vidéos le concernant circulent sur le net. Toujours choqués par sa disparition, nous ne pouvons pas encore les regarder sans être affectés. C’est pourquoi nous ne partagerons pas de liens ici pour l’instant.

Une fois n’est pas coutume, nous vous conseillons un album de musique sorti il y a peu qui aurait peut-être plu à Bernard Stiegler « fou de jazz » et qui s’écoute très bien quand on est covidé. Il a été composé par deux musiciens, Jean-Marc Foltz et Stéphan Oliva, et il propose une relecture délicate des standards de Duke Ellington, sans « big bang » (heu big band !) cela va de soi. À noter : la pochette d’Emmanuel Guibert, l’auteur avec Didier Lefèvre de la bande dessinée Le Photographe !

Bien à vous,
HTC

Petite revue de presse sur des thèmes en lien avec le site :

Chili :

En 2020, nous avons voyagé au Chili pour documenter la « méga-sécheresse » qui touche le pays. Voici les derniers développements très inquiétants dans la capitale.

Allemagne :

Un article de presse nous apprend qu’un autre village est menacé de disparition par l’agrandissement d’une mine de charbon. Au moment de la COP23 à Bonn, nous avions photographié le village de Manheim déplacé pour la même raison.

Actions XR et autres luttes :

Entre les deux tours des présidentielles, le mouvement « Extinction Rebellion » que l’on documente depuis la COP24 de Katowice en Pologne a mené une action à Paris. Après l’élection présidentielle, ici une autre action dans la France entière contre l’artificialisation des terres. Durant notre tour de France, nous avons travaillé sur cette problématique.

Homo Confort :

Enfin, le lien d’un livre qu’on essaiera d’avoir sous la main un de ces jours.

Voilà pour le post de cette quinzaine. À vous les studios !