À gauche : Las Juntas de los dos ríos (la Hoz Seca à gauche et le Tage à droite)
À droite : Notre campement au bord du Tage, à une cinquantaine de mètres de Las Juntas.
Parque natural Alto Tajo, Guadalajara, Castilla-La Mancha, Espagne – 3 Août 2022.
C’est Maria-Jesús et Raúl qui nous ont parlé pour la première fois de Las Juntas de los dos ríos, là où le premier affluent du Tage, « la Hoz Seca » se joint aux eaux du Tage. Ils sont un couple de bergers qui possède deux troupeaux de moutons. Durant six mois de l’année, ils les font paître dans le coin et les six autres mois en Andalousie, à Córdoba. Lors de la rencontre, Raúl demande à Toto qui est en train de photographier le troupeau dans le río à sec : « Alors, tu cherches un travail de « pastor » (berger) ? »
La conversation s’engage donc sur le ton de la blague mais devient rapidement sérieuse lorsqu’ils nous apprennent qu’à cause du manque de pluie, depuis un mois environ, ils doivent nourrir leurs bêtes au maïs. Ils font aussi tourner le groupe électrogène pour tirer l’eau du puits afin de donner à boire à leurs animaux. C’est la première fois que ça leur arrive ; et les deux orages qui nous ont surpris ces derniers jours en nous trempant de la tête aux pieds ne vont pas suffire à changer la donne.
Bon, après on vous passe les détails mais nous avons dormi, au bord du fleuve, dans un camping hors de prix tenu par de jeunes tatoués (27 euros pour prendre une douche chaude !). Le jour suivant, malgré les indications d’Abel, nous nous sommes un peu perdus et avons beaucoup douté avant de bien galérer sur la piste finale en mauvais état et très caillouteuse qu’on nous avait signalée. À flanc de ravin, il a fallu que l’on s’entraide pour pousser à deux chaque vélo, l’un après l’autre, dans les nombreuses pentes raides où le sable et les cailloux se dérobaient sous nos pieds.
Mais la chance a souri au cyclo-photographe car nous avons pu pendre une photo de Javier et Pepe, deux pêcheurs à la mouche accompagnés de leur chien Roco, pile-poil à la jonction des deux fleuves ; le Tage de la taille d’un ruisseau apportant une eau jaune fraîche et la Hoz Seca beaucoup plus grosse, une eau bleue verte glaciale s’unissent à cet endroit. Nous avons planté la tente en amont, au bord du Tage, et nous n’avons plus vu personne jusqu’au lendemain sur la piste à nouveau où nous avons croisé Abel (qui s’inquiétait peut-être pour nous) dans son vieux 4×4 rouge avec ses deux grands chiens.
De retour à Peralejos de las Truchas, le premier village que longe le Tage, Manuel et Maria (tout en nous offrant le petit déjeuner) nous ont permis de recharger les batteries de tout notre petit matériel électronique ; car en plus d’être sans réseau dans la montagne, nous étions à cours de munitions pour continuer à travailler. Et Manuel, qui nous a amenés faire des photos à la cascade près de l’ermitage, nous a enseigné le proverbe qui dit : « La Hoz Seca lleva el agua y el Tajo lleva la fama. » (La Hoz Seca amène l’eau et le Tage amène la célébrité.).
Au final, même si cela nous a coûté physiquement, nous sommes bien contents d’avoir suivi les conseils de Raúl et Maria-Jesús. À un moment, on se serait presque pris pour des photographes du National Geographic mais sans le matériel, sinon nous aurions pu photographier les chevreuils aperçus et les nombreux rapaces qui planaient dans le ciel au dessus de nous. Vivre ce genre de petite aventure nous rajeunit. Ça nous a rappelé l’expérience pas simple de l’expédition pour voir le tepuy Roraima, au Venezuela, lors d’un voyage au siècle précédent.
« Vale », on aurait pu vous parler dans ce post d’autres rencontres mais avec la canicule actuelle dont beaucoup souffrent, on s’est dit que ces histoires de ríos pouvaient être rafraîchissantes.
Abrazos y Suerte,
Hélène et Thomas