Aqueduc Campos del Río, au-dessus de parcelles d’arbres fruitiers. Campos del Río, Région de Murcie. Espagne – 7 Décembre 2022.
Bonjour,
Voici deux nouvelles galeries de notre périple dans la péninsule ibérique.
La première concerne la remontée du fleuve Segura.
Si la descente du Tage puis la remontée du Guadalquivir faisaient partie de nos plans dès le départ, la descente du Segura a été ajoutée par la suite.
Un soir, avec des hôtes fort sympathiques nous avons eu une discussion à bâtons rompus comme on les aime. Nous étions dans l’ancienne maison familiale qu’ils nous avaient gentiment prêtée pour la nuit, attablés devant de généreuses tranches fraîches d’une pastèque du jardin, notre carte routière entièrement dépliée :
– Vous avez dit tout à l’heure que vous voulez suivre le Tage de sa source jusqu’à Lisbonne ?
– Si Señor !
– Génial (prononcé Rénial) ! Et après vous rentrez comment ? En avion ?
– Non, après on va aller à l’embouchure du Guadalquivir et remonter à sa source dans la sierra de Cazorla, pas très loin de Úbeda, ici exactement (on avait mis une petite croix).
– Phénoménal ! Et après vous faites quoi ?
– Ben, on ne sait pas encore. Peut-être retourner dans la province d’Alméria (où Toto avait réalisé des reportages sur l’agriculture intensive il y a une dizaine d’années) pourrait être une option, s’il nous reste encore du temps avant de rentrer.
– Regardez (Mira !) ! Pas très loin de la source du Guadalquivir, on voit, là, le début du fleuve Segura. Vous savez, il y a beaucoup d’eau du Tage qui est détournée pas loin d’ici pour aller alimenter les cultures d’Andalousie. L’eau est déviée par un canal (de 300 km environ) du Tage jusqu’au Segura. Et puis vous voyez, le fleuve se termine dans la Mar Menor. Il y a beaucoup de problèmes écologiques là-bas.
– C’est sûr que si on pouvait documenter ce fleuve en plus, ce serait un trait d’union parfait avec nos premiers reportages.
– Cela serait absolument phénoménal ! (Rires)
Le lendemain matin, nos hôtes nous ont proposé de rester plus longtemps avec eux. Après avoir longuement hésité, nous avons courageusement décollé dans la chaleur de presque midi, car le chemin jusqu’à la Mar Menor ne se fera pas tout seul, ni en un jour ! Des rencontres comme cela vous motive pour des semaines !
Pourtant, le plan élaboré avec nos nouveaux « amigos » a failli ne pas se faire. Après Cordoue, où nous avions documenté entre autres le filet d’eau qui coulait sous le Pont romain (ou Pont Vieux) pas loin de la Mezquita, nous sommes tranquillement partis en fin de journée pour aller passer la nuit dans un camping tout proche. La miss avait téléphoné dans l’après-midi : oui, il restait de la place et oui encore, il était juste à la sortie de la ville.
Seulement, ce que le réceptionniste pas contrariant ne nous avait pas dit, c’est que ce camping se trouvait dans la montagne et que pour l’atteindre, et bien merci hein !
Extrait d’une note que nous avions postée alors dans ce blog (novembre 2022) :
« Petite anecdote : pour atteindre à la nuit le camping le plus proche de Cordoue, dans la Sierra de Córdoba, il y a une grande côte sur des kilomètres avec un tronçon pourvu d’une pente à 14 %. Et bien ce matin à notre départ, des clients qui nous avaient vus en plein effort la veille nous ont félicités : « Le Tour d’Espagne passe souvent par là, avec en plus tous vos bagages vous êtes des champions !». Si c’est eux qui le disent … Et on a même été applaudis au moment où on s’élançait pour partir ! Muchas gracias ! »
Ben pas tant que ça des champions ! La veille c’est sûr, nous avions bravement escaladé la montagne mais le surlendemain, les ischio-jambiers de Toto ont lâché. Nous avons cru sur le moment que ça y est : les maudites tendinites étaient de retour. Heureusement un appel téléphonique à un ami d’enfance, lui champion pour de vrai, nous a rassurés :
– Là, comme tu me décris ta douleur et son emplacement, je dirais plus que c’est une vulgaire contracture.
– Pour le traitement ? Attends, j’ai ma fille pas loin (elle fait des études de médecine).
– Dis, quand on a une contracture il faut prendre des anti-inflammatoires ?
– Noooon ! Du repos seulement ! (voix lointaine).
C’est sur la terrasse de Paco, pas loin du barrage de Martín Gonzalo que les drôle d’oiseaux de passage équipés de vélos et d’une tente se sont posés quelques jours. Tous les matins, la miss avait droit à son demi litre de chocolat chaud offert par Paco. Nous avions vue sur son oliveraie, discuter avec lui était agréable, la petite musique de son accent andalou si caractéristique était un plaisir à entendre. Encore Merci à lui !

La seconde galerie quant à elle, est consacrée à nos hôtes, le plus souvent d’un soir, que nous avons rencontrés au cours de notre périple. À l’instar de ces deux anecdotes, nous pourrions vous en raconter bien d’autres car chaque image présentée a son histoire.
Pour terminer comme souvent en vous parlant de photographie, si on dit Espagne, nous pensons spontanément à Cristina García Rodero. Une grande dame ! Ici, vous trouverez un aperçu de son travail et là une vidéo qui la présente.
Si on dit Royaume-Uni, dans un précédent post, nous avons déjà mentionné beaucoup de photographes mais Peter Mitchell n’y était pas, et pour cause ! Nous venons juste de découvrir l’existence de ce photographe de Leeds. Pareil, ici vous trouverez un aperçu de son travail et là une vidéo qui le présente.
Et puis nous avons appris la mort de la photojournaliste palestinienne Fatima Hassouna, héroïne de « Put Your Soul on Your Hand and Walk », un documentaire sélectionné au prochain festival de Cannes. Sa maison familiale a été bombardée le 16 avril. Dix membres de sa famille sont également décédés, avons-nous lu. Au total, environ 200 personnes des médias palestiniens ont trouvé la mort depuis l’offensive du gouvernement israélien. Gouvernement de Benyamin Netanyahou qui « s’apprête à lancer une offensive à grande échelle et à occuper durablement l’enclave » de Gaza. L’ONU (Organisation des Nations Unies) a rejeté un tel plan en dénonçant une « stratégie militaire » qui « viole les principes humanitaires fondamentaux ».
Dans un article du 7 mai 2025 de l’ONU Info, nous avons lu :
« M. Türk n’est pas allé jusqu’à prononcer les mots d’extermination, de nettoyage ethnique ou de génocide. Mais la description qu’il a faite de la situation laisse peu de place à l’interprétation : « Les actions d’Israël visent à infliger aux Palestiniens des conditions de vie de plus en plus incompatibles avec la poursuite de leur existence à Gaza en tant que groupe ». Volker Türk, étant le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.
Nous n’avons jamais travaillé sur le conflit israélo-palestinien (appelé ainsi depuis des années dans les médias). Mais on ne peut pas (comme on l’a fait il y a 15 jours) faire un post sur l’humanisme sans (encore) en toucher un mot maintenant. Nous étions en train de réaliser la suite des reportages en Espagne (on remontait le fleuve Èbre) quand nous avons appris le massacre du 7 octobre 2023 perpétré par le Hamas. Et nous avons pris connaissance bien plus tard de ce qui s’était passé exactement ce jour-là par cet article du Monde.
Même si lors de notre premier voyage à vélo en direction de l’Inde en 2001-2002, nous nous étions arrêtés dans le tristement célèbre camp de réfugiés palestiniens de Chatila, à Beyrouth, avant de rouler vers le sud Liban. De là, nous avions vu Israël seulement de loin ; il y avait alors les Casques bleus de la FINUL (Force intérimaire des Nations unies au Liban) et poursuivre dans cette direction aurait été compliqué, nous avait-on expliqué.
Comme pour beaucoup d’autres personnes, on imagine, ainsi que pour l’ONU « sévèrement critiquée » : tout cela nous dépasse. D’une façon générale, il nous semble que ne jamais s’arrêter sur ce qui se passe là de tragique (là comme dans d’autres parties du monde, au Soudan et ailleurs), ne jamais en faire mention dans les conversations et s’en désintéresser par sentiment d’impuissance n’est pas une solution, bien au contraire (si l’on ne veut pas basculer complètement dans l’inhumanité).
Ici, vous trouverez une émission de radio de France Culture ayant comme titre « Gaza : un avenir suspendu » avec Samy Cohen et Agnès Levallois et là un édito (toujours sur la même station) du journaliste politique Jean Leymarie intitulé « Gaza, un malaise français ? ». Ces deux programmes balaient beaucoup de questions sur la morale de la guerre et l’impasse tragique dans laquelle se trouve la région. Et au niveau national, ils évoquent les tergiversations dans les réactions du gouvernement français (en plus des stratégies électoralistes des différents partis d’opposition qui y sont énoncées).
Quand nous étions au Royaume-Uni est sorti en salle un film documentaire né de l’amitié entre un Palestinien et un Israélien : « No Other Land (Pas d’Autre Terre) ». Aussi poignant qu’instructif avons-nous lu. Il a obtenu de nombreux prix comme un Oscar à Hollywood. Voici une interview vidéo des deux réalisateurs et ici un article sur sa difficile diffusion en Israël (du fait du gouvernement de Benyamin Netanyahou).
Bon, c’est vrai qu’il est toujours un peu compliqué de conseiller des œuvres sans les avoir vues, lues ou écoutées. Dans les jours qui viennent, on va essayer de voir ce film.
Bonne quinzaine à vous,
Hélène et Thomas
PS : – Cette quinzaine, nous avons été intéressés par l’intervention de David Colon (historien) sur les cybers attaques russes. Du coup, tout en triant les dernières photos UK, nous avons écouté une autre intervention de lui sur la manipulation de nos sociétés.
– Jean Jouzel, infatigable défenseur du climat était encore dans une émission radio de grande écoute pour présenter son nouveau livre co-écrit avec Alain Grandjean et Claude Henry : « Les orphelins de la Planète ».
– Bugs Matter – « Un million d’espèces vont disparaître en 30 ans » nous explique Philippe Grandcolas (directeur de recherche au CNRS) dans une émission radio de grande écoute. Ici encore une interview vidéo plus longue et toujours très claire de lui sur « Pourquoi l’effondrement de la biodiversité nous menace ? ».
– En relisant dernièrement quelques posts lors de la mise en ligne du nouveau site, on s’est rendus compte qu’on n’avait pas mis en lien beaucoup de musique de nanas ! Pourtant, on en écoute régulièrement, notamment quand il s’agit d’écrire nos petites notes bi-mensuelles. Assez souvent, Hope Sandoval est convoquée, sa voix et sa musique sont une aide précieuse. Ici un de ses albums. Cette fois-ci, nous avons fait appel à Macha Gharibian et son dernier disque « Phenomenal Woman », pour se mettre dans le « mood » de la rédaction.