– Capture d’écran d’une photo de Matt Rourke montrant Donald Trump, nouvellement élu président des États-Unis, le jour de son investiture à Washington – 20 Janvier 2025.
– Manifestation lors de la COP23 sur les changements climatiques. Bonn. Allemagne – Novembre 2017.
Bonjour,
Oui, on sait, ce n’est peut-être pas très charitable de vous mettre le Trump en tête de gondole de ce nouveau post.
Comme nous sûrement, vous devez être, sinon inquiets après la cérémonie d’investiture, du moins sidérés par le retour en fanfare de Trump dans le bureau ovale. On n’imagine pas trop que certains lecteurs de ce blog soient euphoriques mais qui sait !
« Salut romain », visées impérialistes, droits humains attaqués, plan d’investissement nommé Stargate dans l’Intelligence Artificielle, guerres commerciales, etc : Trump/Musk saturent les médias comme il fallait s’y attendre. De nombreux commentateurs analysent que cet événement inouï lance le second quart du 21ème siècle dans une ère politique, économique, sociale, géopolitique, technologique et culturelle sans équivalent. Quand on pense qu’on nous disait, il n’y a pas si longtemps encore, que Donald Trump avait de sérieuses chances de se retrouver derrière les barreaux…Voyons maintenant ce qu’il va advenir. Espérons que les institutions américaines seront suffisamment solides pour ne pas être contournées et que les contre-pouvoirs pourront toujours jouer leur rôle.
Si on vous en parle, c’est que certaines annonces et décrets, pris lors de l’hallucinante « intronisation » ou après, ont des rapports directs avec nos reportages passés. Le plus souvent, on ne tient pas trop à ramener notre fraise quand l’actualité se rapporte à nos travaux documentaires ; mais parfois il le faut car, comme on dit, c’est « à propos ». Et puis, si on ne fait pas nous-mêmes vivre notre travail, qui le fera ?
– En 2009, suite à une enquête sur l’agriculture intensive en Espagne (voir ici), nous avions produit un reportage similaire dans les États de Floride et de Géorgie. Nous documentions alors les conditions de vie et de travail des ouvriers agricoles, tous Sud-Américains ou presque. Ces images sont réunies dans le sujet appelé « Ce travail qui nous nourrit ». Bien évidemment, ce reportage prend une nouvelle résonance alors qu’on assiste à l’offensive anti-immigration de la nouvelle administration. Une question se pose, en plus de celle très préoccupante des droits humains : qui prendra la relève dans les champs si ce modèle d’agriculture intensive perdure ? Ce qui est fort probable sous Trump…
– En 2015, nous avons réalisé un reportage sur la COP21 qui s’est conclu par l’Accord de Paris : un « traité international juridiquement contraignant sur les changements climatiques » adopté par 196 pays et entré en vigueur le 4 novembre 2016. Son objectif : maintenir « l’augmentation de la température moyenne mondiale bien en dessous de 2°C au-dessus des niveaux préindustriels » et poursuivre les efforts « pour limiter l’augmentation de la température à 1,5°C. »
Durant les années qui ont suivi, nous nous sommes rendus à chaque COP (Maroc-Allemagne-Pologne-Espagne) jusqu’à la COP 26 qui a eu lieu à Glasgow en Écosse, en 2021. Là, il a été clair pour nous que l’objectif des 1,5°C ne pourrait malheureusement plus être tenu. Du coup, on s’est demandés si ce n’était pas le moment d’arrêter notre suivi des COP qui commençait à nous coûter cher financièrement. Après avoir longtemps hésité, nous avons finalement renoncé à aller à la COP 27 en Egypte ainsi qu’aux suivantes à Dubaï et en Azerbaïdjan. Aussi n’ayant jamais pu entrer dans les enceintes des sommets, nous avions beaucoup axé nos reportage sur la société civile qui s’organisait pour faire pression sur les décideurs. À Charm el-Cheikh et après, cela aurait été plus difficile et surtout, on aurait pris le risque de mettre en danger des personnes en les photographiant.
Alors que la COP 22 se tenait à Marrakech, Trump a été élu président des USA pour la première fois et il avait promis durant sa campagne qu’il sortirait de l’Accord de Paris ; promesse qu’il honorera en juin. Ce qui bien sûr doucha les espoirs de beaucoup de monde, compte tenu de l’importance de son pays sur la scène internationale et de son poids dans les émissions de gaz carboniques.
La COP suivante à Bonn, nous fûmes surpris de voir quand même arriver une large délégation États-Unienne officieuse (We are still in) menée par des gouverneurs, des dirigeants d’entreprises, des universitaires, etc.
Par la suite en janvier 2021, quelques heures après sa prise de fonction à la Maison Blanche, Joe Biden a acté par décret le retour du pays dans l’Accord de Paris sur le Climat.
Parallèlement à cette couverture des sommets, nous avons beaucoup suivi (en France principalement) les actions et les Marches Climat qui ont eu lieu dans le monde entier dans le sillage de Greta Thunberg, avant que ce mouvement reflue presque complètement. De nos jours, on entend souvent parler de backlash écologique et du concept « d’indifférence climatique », concept relativisé ici par Théodore Tallent (Doctorant en science politique au Centre d’études européennes de Sciences Po Paris). Et on peut lire dans la presse, pas plus tard qu’aujourd’hui, que la criminalisation des militants en faveur du Climat s’accentue au Royaume-Uni.
Vous pouvez voir ou revoir nos reportages sur les COP ici et sur les Marches là.
Notre travail aura tenté de documenter, avec nos modestes moyens, la fenêtre qui s’était entrouverte au moment des accords de Paris en 2015 et qui s’est peut-être refermée définitivement avec la réélection de Donald Trump. Sur le papier, une fenêtre de tir existe encore mais elle tend à se rétrécir à mesure que les années passent et que les pays sont bien loin de respecter leurs engagements pris alors.
D’une manière générale, il nous semble que les images que nous vous proposons de regarder (que ce soit sur la thématique agricole ou environnementale) rendent en quelque sorte justice : justice à la majorité des personnes qui se sont mobilisées pour le Climat ainsi qu’à tous les ouvriers agricoles travaillant dans l’agro-industrie qui produit de l’alimentation pas chère pour au moins des millions de gens.
Pour finir, nous tenons à dire que même s’il est très clair que nous ne sommes pas vraiment dans les clous de l’Accord de Paris, chaque degré compte comme le disait récemment Jean Jouzel (ancien co-président du GIEC et infatigable défenseur français de la cause environnementale) dans un entretien radiophonique. Pour mémoire, l’année 2024 a été confirmée par l’Organisation météorologique mondiale (voir ici) comme la plus chaude jamais mesurée avec déjà une moyenne de 1,55 degré comparée à l’ère pré-industrielle.
Ces données et les derniers événements climatiques (Valence, Mayotte, Los Angeles, etc.) devraient nous faire réfléchir… Par exemple (au risque d’enfoncer des portes ouvertes !) sur les liens entre l’alimentation, l’énergie, le climat, la biodiversité, les transports et les migrations.
Plus prosaïquement, nous avons ces deux dernières semaines continué à laborieusement trier les innombrables photos que l’on a ramenées du Royaume-Uni et d’Irlande. Et puis avec l’ami Jim, nous avons poursuivi nos efforts afin d’être en mesure de lancer notre nouveau site photo aux alentours du mois de mars.
Bonne quinzaine à vous,
Hélène et Thomas
PS : – Voici le lien d’une série de 6 podcasts qui vient d’être mise en ligne sur le site de France Inter. Cette nouvelle série de Thomas Snégaroff s’intitule « Les oligarques de la Silicon Valley. Anatomie d’un pouvoir sans limite ». Nous venons d’en prendre connaissance par cette émission et pour sûr nous allons écouter la série dans les jours qui viennent, tout en triant nos photos faites outre-Manche et relatives à la première révolution industrielle.