Dans mon souvenir, chaque fois que notre cousin agriculteur appelait pour prendre des nouvelles (des citadins oublieux que nous sommes !) et que je lui en demandais en retour, j'avais droit au : "Comme d'habitude", "Ici pas grand choses, le train-train", "Oui, il y a un un peu de travail à la ferme en ce moment"... Ca me faisait penser à une citation de Thornton Wilder: "La vie quotidienne, la vie quotidienne, la vie quotidienne".
Fin 2009, les médias nous entretenaient matin, midi et soir : de la crise du lait, de la faillite d'exploitations agricoles, des suicides chez les paysans... Mon référent de l'agence photo à Paris me suggéra d'aller faire des images dites “d'illustration” (de loin, de dos, etc.) dans les fermes pas très loin de chez moi. Cela permettrait peut-être quelques ventes. Faire juste quelques clichés de ce genre ne m'intéressait pas vraiment, mais par contre j'avais bien envie de découvrir l'univers soit-disant banal d'un agriculteur.
C'est dans ce contexte et avec cet état d'esprit que je déboule dans le Tarn chez le cher producteur de lait, afin de le photographier lui et son épouse dans leur quotidien. C'est la période de "pic laitier" et je suis frappé par l'important labeur, l'abattage qu'il faut avoir et les compétences de tout ordre nécessaires. Rapidement je les surnomme "supers héros" et nous envisageons de poursuivre le reportage. Je pourrai ainsi montrer le travail qu'il effectue dans ses champs pour nourrir toute l'année son troupeau d'une quarantaine de vaches.
"Couvrir" l'ensemble du fonctionnement de la ferme sur une année me prendra presque le double de temps, car dans l'intervalle je parcours 8 mois durant Afrique de l'Ouest à vélo (voir les reportages Afrique de l'Ouest).
Mon "cahier des charges" au moment de la sélection des images est en gros : documenter l'impressionnante activité d'un producteur laitier dans une exploitation de type familiale (que l'on peut trouver dans tout le pays et qui font en partie la spécificité du modèle agricole français), les techniques utilisées en 2011, et chroniquer un peu la vie qui en découle.
La dernière fois que nous avons mangé ensemble et que je me renseignais où en était le "dossier du lait" question politique, le cousin me dit que sa situation financière allait un peu mieux qu'en 2009 et 2010 mais qu'il avait une visibilité à 6 mois seulement. Qu'en sera-t-il avec la réforme prochaine de la PAC (Politique Agricole Commune) ?
Je vois tout cela comme une métaphore de la vie moderne, que nous soyons agriculteurs ou que nous labourions les nouveaux champs de l'économie virtuelle. Autrefois, la profession d'éleveur laitier dans le monde agricole était considérée comme noble et financièrement stable (du fait des quotas laitiers). On pouvait avoir une certaine sérénité. De nos jours, précarisés, souvent accusés d'être des empoisonneurs et des pollueurs, ils doivent, pour rester la tête hors de l'eau : ils produisent du lait et des céréales à leur maximum, continuer à se former, investir (pourquoi pas dans le bio ?), ... Bref, être en perpétuelle remise en question et toujours sur la brèche, sans vraiment trop de filet de sécurité.
Est-il humain de mettre autant de pression sur les gens ? Est-il intelligent, alors que nous sommes presque à 10% de chômage et que la production de nourriture est vitale (sur une planète de plus en plus peuplée et aux ressources limitées), que des agriculteurs passionnés et possédant un outil de travail amélioré de génération en génération renoncent ? Au cours de mon reportage il ne fut pas rare que j'entende qu'un voisin avait arrêté.
Que vont devenir les campagnes si la concentration des exploitations s'accroît encore et que seules les grandes de type "agro-business" s'en tirent ?
Dans mon souvenir, chaque fois que notre cousin agriculteur appelait pour prendre des nouvelles (des citadins oublieux que nous sommes !) et que je lui en demandais en retour, j'avais droit au : "Comme d'habitude", "Ici pas grand choses, le train-train", "Oui, il y a un un peu de travail à la ferme en ce moment"... Ca me faisait penser à une citation de Thornton Wilder: "La vie quotidienne, la vie quotidienne, la vie quotidienne".
Fin 2009, les médias nous entretenaient matin, midi et soir : de la crise du lait, de la faillite d'exploitations agricoles, des suicides chez les paysans... Mon référent de l'agence photo à Paris me suggéra d'aller faire des images dites “d'illustration” (de loin, de dos, etc.) dans les fermes pas très loin de chez moi. Cela permettrait peut-être quelques ventes. Faire juste quelques clichés de ce genre ne m'intéressait pas vraiment, mais par contre j'avais bien envie de découvrir l'univers soit-disant banal d'un agriculteur.
C'est dans ce contexte et avec cet état d'esprit que je déboule dans le Tarn chez le cher producteur de lait, afin de le photographier lui et son épouse dans leur quotidien. C'est la période de "pic laitier" et je suis frappé par l'important labeur, l'abattage qu'il faut avoir et les compétences de tout ordre nécessaires. Rapidement je les surnomme "supers héros" et nous envisageons de poursuivre le reportage. Je pourrai ainsi montrer le travail qu'il effectue dans ses champs pour nourrir toute l'année son troupeau d'une quarantaine de vaches.